Chaque jour
Je trébuche
Je rate autant que je réussis
Et la beauté m'élève aussi haut
Que le gouffre aspire tout entier
L'espoir nourri
Je suis l'ange et le salaud
Chaque jour
Je t'aime
Autant que je m'en défends
Et la grâce me porte
Avec tant de délicatesse
Que le monstre en moi
Réclame d'avaler l'enfant
Je suis de la liberté, le chasseur
Chassé par sa tendresse
Chaque jour, je me lève
Pour une lutte
et me recouche aussitôt
Dans le doute
Que voulez-vous
J'aime de la vie
Tous les défauts

C'est un morceau de moi
Une part de terre fertile
Flottant
Dans l'écrin de l'âtre
Dans l'écrin de mon être 

Un humus dont je mesure
Le précieux
La merveille

Gorgé d'eau il se dissout
Sec, il se rétrécie
 
Je l'averse et le réchauffe
Avec attention
Pour l'apprivoiser

Je voudrais le voir grandir
En profusion de couleurs
Sentir ses ramifications s'étendre
Dans mes veines
Être l'artisan de son déploiement

Je suis l'arbre et le bois qui brûle
Le menuisier et le veilleur 

Tu as frotté tes mains aux miennes
Le feu allumé est ancien
Il a pris racine, il a pris feuillage
 
Je suis ce papier et ces lignes
Les mots et la terre volcanique

Tu es retombé en pluie légère
Arroser mes brouillons
Illuminer mon poème 

Tu es le gardien de notre lumière
Je suis cette part de terre fertile
Dansant sur un feu millénaire 
 
 
 

Intermittence
 
En silence
Tes pas allongent
L'espace
 
Dans les rues éclairées
Par les souvenirs
Tu cherches l'équilibre 
 
Sur la pente
Ta tête s'incline 
 
Dans le sombre
Un murmure
Ravive le vent
 
L'eau se trouble
Devant l'évanescence
de ton visage
 
Au loin,
Une ombre fleurit à la lune
Toute pleine
 
Je porte mon cœur
En boutonnière
C'est le printemps
 
Tes renoncules offrent
À mon ciel humide
Leurs corolles rouges 
 
Leur tige creuse les troue
Du dedans 
 
Je voudrais éloigner
Ce vide,
Ce couloir effrayant 
 
Te retrouver
plein et moi pleine
 
Je porte la délicate fin
Du recommencement 
 
 

 

Une fulgurance te saisit
Éclair blanc zébrant ton jour
Tu te fais vieux à midi
Ricochet d'un galet lourd
 
Qu'est-ce qui peut encore
Percuter ta joie?
Qu'est-ce qui toujours dort
Au fond de toi?
 
Fil tendu dans l'ordinaire
Fendant le sourire béat
En large et à travers
La peur et ses passe-droit
 
Que veux-tu de tes bras
Enserrer fort?
Qu'aimes-tu au-delà
Du réconfort?
 
La terre collée à tes pieds
Te rappelle l'art et la matière
Notre amour manufacturé
D'ombre et de lumière

 
Retourner le monde
Regarder à travers
Je ressens la vie
Ses travers
Ses traverses

Je traverse
En moi le ressenti
Accepter l'ombre
Mes yeux à l'envers

À l'envers
Je te vois mieux
Je vois ta misère
Ses trous
Ses troubles

Tu roubles
J'aime la matière
De ton cœur vitrail
Le plomb dont il serti 

Certitudes plombées
Tu colores l'infini
Du jour me perces
Tes infiltrations
Tes inquisitions
Je pose question

Toi, fragile, gracieux
Emplit de lumière
Tu retournes le monde

 
 
 
 
Poser à l'abri mon regard,
De la fenêtre sentir bouger la ville
Sur le parking se garent
Des voitures manoeuvrant, dociles
 
 
Les formes, les couleurs
Les objets miniaturisés d'un jeu
Font du temps un ascenseur
De mon corps, un reflet bleu
 
 
S'impose l'imposteur et pourtant
A l'intérieur, une zone urbaine grouille
Une ville sans ordonnement
Des refus de priorité, une dépouille
 
 
Ton corps sur le boulevard
La foule des passants pressant le pas
Toi sans tôle, sans fard
Les véhicules qui ne s'arrêtent pas
 
 
Mon cri, sirène d'exclamation
Du bitume, expulse un jardin
Autour tourne la circulation 
 
Je suis un rond et toi le point 
 
 

Emplie de notre ivresse
Livrée à notre promesse

Est-ce que je m'élève, détachée du sol?
Solitude surprenant ce splendide envol

Volé au temps de notre ultime alliage
L'âge est au rêve vrai et au courage

Rage inutile du vide entre mes mains 
Maintenant perçe un cri en mon sein

Symphonie infinie fait notre amour
Mourir à ta mort, vivre sans recours

Courrir mes jours sous l'or de ton âme
A mi-parcours, ne pas perdre flamme

Emplie de notre ivresse 
Espérer la promesse

 


 
Il ne suffit pas de sentir grandir le désir
Il ne suffit pas de mettre son cœur à l'ouvrage
Faut-il encore partir au moment du partir
Prendre un bon départ, en avoir le courage 
 
Être ensemble au rendez-vous
Es-tu parti, es-tu en route?
 
Être ensemble au rendez-vous
Que faire du dernier doute?
 
Conjurer nos errances solitaires
Converger nos efforts, bâtir une maison
Nos pas jouant du même air
Nos âmes dansant de la même façon